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Kate

Quand on arrive chez Kate, on arrive dans un jardin, dans une forêt même.
Comme si, passé le seuil, on rentrait dehors.
Le coq n’est plus là !
Mais dans la chambre, il y a au plafond un superbe nid de frelons. Ils sont venus un jour, par la fenêtre toujours ouverte. Ils ont eu le temps de bâtir et de vivre là . Kate les a accueillis, longtemps et les frelons lui sont restés fidèles.

Tout ce qui est dehors est comme ce qui est dedans. La Nature est là, Kate regarde la Nature et la Nature la regarde, Kate est dedans et Kate est la Nature.

Dans la famille Savalle il y a trois filles :
Zeg et puce, la Marthe et Azor dite Az
C’est leur mère qui les a rebaptisées de tendresse !
Zeg et puce c’est l’aînée, c’est Catherine. La Marthe c’est Monique et Az c’est Marie-Pierre.
Marie-Pierre est là avec sa fille, Marina. Marina-Pucette est la nièce-filleule de Kate. Marina a deux filles, Héléna et Victoria ; Héléna qui vient d’avoir 10 ans a dit à sa mère : « si j’adore la nature c’est ta tante qui m’a donné ses gênes »
Monique qui est dans l’extrême de la douleur est avec nous par la pensée, avec Rabas son conjoint ; et Karim leur fils, surnommé Tilou par Kate

Les 3 sœurs ont toujours été comme les doigts d’une main : très différentes, toujours unies. Si proches tout en étant si éloignées géographiquement. « On s’entend très bien toutes les trois, on ne se voit pas souvent, mais la douleur est immédiate pour les trois ».

En Normandie, à Sandouville en Seine maritime, c’était une petite ferme, en polyculture élevage. Les parents faisaient de tout, sans engrais, sans pesticides. De la fourche à la fourchette, rien ne se perd, tout se transforme.
De quoi vous enraciner au cœur le bio, le simple, le direct…

Après la mort de la mère, Kate allait voir son père là-haut.
Et puis le père est mort en 2011.
Et puis la ferme a été vendue.

Ici nous n’avons pas connu tout cela.

Ici nous avons connu Kate, nous n’avons pas connu Catherine.
Quand elle est arrivée à Die avec Gérard, elle ne s’appelait plus Catherine mais Kate.
Mystères du moment de cette transformation, au cours ou après un séjour en Angleterre où Kate a séjourné pour parfaire son anglais dans l’intention d’être…secrétaire bilingue !
Kate c’est tellement doux et plus enrobant.

Kate et Gérard sont arrivés en 1988 pour gérer le cinéma le Pestel.
Cinéma devenu communal en 1983 sous la houlette de deux adjointes fort investies dans le projet, Nicole Moulon et Micheline Lys, lors du mandat de Marcel Bonniot

1988-2004
Gérard et Kate, Kate et Gérard.
Le cinéma prend son essor par eux, avec eux, dans leur relation unique, intense, fusionnelle et si fructueuse.
16 années à projeter ensemble, écouter, conseiller, 16 années à tisser des liens, établir des ponts avec la libraire Mosaïque, avec le festival Est Ouest, avec la fête de la transhumance, avec le théâtre les oiseaux de passage, avec les acteurs de la vie locale et quotidienne…
Le cinéma devient un lieu de rencontres, de débats, de partages, d’ouverture, de curiosités, de découvertes, d’émotions.
Le Pestel est une maison, chacun est chez soi avec les autres, cette maison est habitée en permanence par Gérard et Kate, cette maison est toujours grande ouverte sur l’univers cinématographique, sur l’univers d’une toute petite ville, sur l’univers que chacun porte en lui, que chacun porte en soi.
Le cinéma est un espace hors du temps, nous n’en sortons jamais comme nous y sommes entrés ; Gérard et Kate vivaient dans cet hors du temps !
2004, Gérard meurt
Nous étions tous là, réunis de chagrin ici même, tous ensemble.
Des membres de la famille de Gérard sont là aujourd’hui.

A la mairie, nous nous demandions ce qui allait se passer pour Le Pestel.
Je revois Kate arrivant en mairie pour me dire, après mûres réflexions : « Je reprends le flambeau »
Si la ville demande à son délégataire de gérer son cinéma, Kate a fait bien plus.
Elle a poursuivi l’œuvre commencée avec Gérard.
Elle a porté le cinéma de Die encore plus haut et en a fait un lieu culturel reconnu dans le milieu du 7eme art : une référence !
Par une programmation exigeante et indépendante,
Heureux mélange de ce qu’elle souhaitait, de ce qu’on lui demandait, et de « qu’est-ce qui vous ferait plaisir ? »
Carrée, consciencieuse, méticuleuse, elle ne laissait rien au hasard. Elle voyait tous les films qu’elle décidait de programmer selon son fil conducteur. Elle a entrainé le public diois à voir plus loin, plus rare, plus essentiel.
Un nombre incalculable de personnes sont passées au cinéma, ont été invitées et reçues : réalisateurs, producteurs, artistes… Si bien accueillis qu’ils revenaient ! Sa porte toujours ouverte.
C’est elle qui a mis en place les petits déjeuners !
Avec sa ligne de conduite invariable : les spectateurs d’abord, puis les salariés…elle en dernier.

Elle a poursuivi l’œuvre, elle a fait du Grand Œuvre.
27 ans au service du cinéma, au service des diois par le cinéma.

Le Pestel, cette colonne de calcaire qui se détache de la falaise de Glandasse, qu’on voit bien depuis Die, qu’on voit mieux quand on monte au dôme et qu’on bifurque sur la fontaine de juillet,
Cette colonne de clair calcaire veillera encore longtemps sur le cinéma et restera
le titre de noblesse d’âme de : Gérard et Kate du Pestel.

Humble,
Humilité,
Kate savait qu’elle venait de la terre-humus et qu’elle y retournerait.
Avec sa choucroute flamboyante de roux,
Son corsage blanc,
Un peu de khôl aux yeux.
Mais, comme avant, comme autrefois, comme en son enfance : sans téléphone portable, sans carte bleue, sans frigo, ni micro-ondes évidemment !
Avec ses principes auxquels elle ne dérogeait pas,
Dont son fameux café – croissant chaque matin du monde !
Volontaire
Engagée
Généreuse
Intègre
A la fois solitaire et solidaire
Disponible à chacun et chacune !

Ecriture, lectures…souvent ici…
Elle s’était mise au piano, au grec ancien, à l’hébreu à la recherche des plus anciens mystères.
Elle s’était mise au jardinage.
Dimanche je suis allée rôder vers son bout de terre aux fondeaux. J’ai pensé que j’allais la voir sortir du cabanon, entre sauge et romarin ; tout est si vivant dans le joyeux bric à brac de fauteuils, d’arrosoirs, de réserves d’eau et autres outils.
Elle a planté des arbres ; ils ne demandent qu’à grandir. Ils porteront des fruits, les fruits de Kate.
Cet endroit m’émeut ; le rapport des montagnes entre elles et l’angle de vue sur la dent de die et Glandasse me rappellent toujours le tour des Annapurna que nous avons fait ensemble en 1990, avec deux autres dioises. La majesté et la pureté de la montagne, les contacts avec la populations locale, l’effort pour passer le col à presque 6000 mètres dans le froid et la neige, moments de grâce à jamais gravés en nos mémoires !

Kate savait que la vie et la mort sont une seule et même chose.
Kate savait que l’Amour est plus fort que la mort.
Elle le savait, elle le disait, elle le vivait, elle nous le prouvait au quotidien.

Merci Kate d’avoir été,
Merci d’avoir été ce que tu as été.
Tu pars comme tu as vécu, paisiblement.
Tu rejoins ton écureuil et vous serez unis pour l’éternité des éternités.

Isabelle Bizouard
Maire de Die
Die,
le 21 décembre 2021, jour du solstice d’hiver et de la sainte Luce où la lumière fait un saut de puce

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